C'est vers 1875 que nos calfats commencèrent construirent les premières barques de promenade à fond plat propulsées à l'aviron, avec l'extrémité avant ou les deux extrémités pointues (« Lappels-chiff » ). Les embarcations étaient armées en couple, autrement dit le rameur utilisait deux avirons ; en plus elles étaient équipées d'un gouvernail. Celles à l'arrière carré avaient une longueur de 4 mètres en moyenne avec une largeur de fond de 75 à 80 centimètres. Celles aux deux extrémités en pointe mesuraient jusqu'à 7 mètres de long et pouvaient transporter cinq à six personnes.
La barque de promenade connut très vite un grand succès auprès de toutes les couches sociales.
On ramait joyeusement sur l'Ill, au « Fuchs am Buckel », au lac de l'Orangerie, à l'Ile des Pêcheurs (« Fischerinsel »)...Puis on découvrit les beautés de l'aviron en tant que sport. On créa des clubs nautiques et bientôt les randonnées aquatiques comptèrent parmi les activités sportives les plus populaires de l'époque.
Les canots de sport construits par nos calfats étaient conçus pour un, deux, ou quatre rameurs. Ils étaient fabriqués en bois de pin. Ceux à quatre rameurs étaient armés soit en couple, soit en pointe chaque homme tirant des deux mains sur un seul aviron ; ils avaient une longueur de 8 à 9 mètres. Un barreur accompagnait généralement les rameurs.
Notre dernier calfat Jules Andres se lança à un moment donné dans la fabrication de canoés manœuvrés à la pagaie, mais ces embarcations n'entrent plus dans le cadre de la présente étude.
Les barques de loisir
Le bateau de joutes nautiques
Le bateau de joutes mérite d'être cité à part, d'abord parce qu'il concerne une discipline sportive très ancienne ; ensuite il est construit selon le modèle de la barque plate traditionnelle. Son histoire remonte au Moyen-Age.
Au XVe siècle, les pêcheurs et les bateliers de Strasbourg imaginèrent « de faire des tournois comme les seigneurs et chevaliers, mais, n 'ayant ni chevaux ni armures, ils profitèrent tout simplement de leur embarcations ». Par la suite, ces tournois donnèrent lieu à de très grandes manifestations. Sur l'une des gravures de J.M. Weiss représentant les fêtes données en 1744 lors de la visite du roi Louis XV à Stras- bourg, on voit même des femmes participer aux compétitions. La barque de joutes était propulsée à l'aviron, le jouteur se tenant debout à l'arrière. Au XIXe siècle, on dota l'embarcation d'une plate-forme (« Britsch », « Bock ») qui laissait au jouteur une grande liberté de mouvement, tout en rendant le jeu plus spectaculaire.
Les jeux, qui avaient disparu à l'approche de la guerre 1870-71, furent repris en 1887 par une société nouvellement créée dénommée Société Nautique 1887 Strasbourg (« Nautischer Verein ») [18 ]. C'est le calfat Joseph Fassel d'Erstein qui, au cours des mois de mai-juin, construisit les six premières nacelles de compétitions au prix de 55 frs l'unité.
Le bateau de joutes était conçu pour une équipe de cinq hommes comprenant le jouteur, quatre rameurs tirant en pointe et un barreur (« Richtmànn »). Il avait les caractéristiques suivantes :
Construction en bois de pin.
Longueur 9 mètres.
Largeur du fond à l'avant 0,75
au milieu 0,70 à l'arrière 0,55
Hauteur des cotés à l'intérieur 0,35
Longueur de la plate-forme 1,20 m
4 avirons
4 bancs
Somme toute les dimensions et la construction étaient identiques à celles d'une barque de pêche traditionnelle.
Ultérieurement on remplaça les quatre banquettes par un banc unique construit dans l'axe du bateau et mesurant environ 5 mètres de long.
Les bateaux de compétition utilisés actuellement par les sociétés de joutes de Strasbourg et de Bischheim - Schiltigheim ont un fond plus large et les cotés plus hauts.
Jusque vers 1935, pratiquement tous les bateaux de ces deux sociétés ont été construits à Erstein.
barque de joute nautique
Promenade en barque à avirons («Lappelschiff») sur le «Muhlgraben» (1942).