L'histoire des calfats d'Erstein est dominée par deux grandes familles : les Rapp et les Fassel. Chacune d'elles a comporté cinq générations d'artisans dont l'origine remonte à la première moitié du XVIIIe siècle.
Les Rapp habitaient près du « Mühlgraben », au bout de la « Schiffbajergàss » baptisée improprement rue des Bateliers. [ 19 ]
Le chantier des Fassel se trouvait au sud-est de l'Ile du Woerth, sur l'îlot qui forme l'impasse de la rue de l'Etoupe (« Küttergassel »).
Michel Rapp, l'aîné, avait quitté le foyer familial pour s'établir à Ebersmünster. Un fils prénommé Mathias, issu du second lit, devint également calfat.
Jean Georges Rapp était marié avec la fille d'un agriculteur d'Erstein et travaillait déjà plusieurs années à Rhinau. Après la mort du père, il revint à Erstein pour prendre la succession de l'entreprise familiale. Il meurt le 20 juin 1812 dans la force de l'âge. C'est seulement bien plus tard que ses fils Jean Georges et François Michel prendront la relève. Ils travailleront ensemble jusqu'en 1832 où Jean Georges Rapp, dit le jeune, décide de s'installer à Rhinau. En 1833, il épouse Marie Salomée Graebling, veuve en premières noces du calfat Martin Fassel décédé l'année d'avant (cf. tableau : la lignée Fassel). En 1846, il retourne à Erstein pour élire domicile au n° 53 Quartier Verd.
Quant à son frère François Michel Rapp, il avait hérité de la maison paternelle ainsi que du chantier sis au n° 38 rue du Chat. En 1837, il se marie avec une jeune fille d'Ebersmünster, Marie Thérèse Lohner. Malheureusement, celle-ci meurt cinq années plus tard, lui laissant deux enfants sur les bras : une fillette de quatre ans, appelée Françoise, et un poupon prénommé Michel, âgé de 9 mois à peine. Il faudra quinze ans à l'artisan pour retrouver un certain équilibre familial. Tandis que Françoise s'occupe du ménage, Michel seconde activement son père. Si jamais vous passez dans le quartier, vous pourrez voir les initiales du jeune calfat gravées dans le mur qui longe la propriété. L'inscription, assez grossière, se présente comme suit :
RM. SCHIFFBAUER 1862
Emblème de calfat représentant un vaisseau sur le linteau du puits sis dans la cour de la propriété N° 25, rue des Bateliers. A noter la date 1803 et les initiales des propriétaires primitifs : FIR (François Joseph Rapp) et ELN (Elisabeth Nartzer).
Jean Georges Rapp, revenu de Rhinau, travaille également dans l'entreprise. Au mois de janvier 1871, alors que les affaires redeviennent prospères et que tout semble aller pour le mieux, Michel meurt subitement âgé de 30 ans seulement. Le père a passé la soixantaine. Usé par le travail, il supporte mal ce nouveau coup du sort. Quand au mois de mai, son frère Jean Georges décède à son tour, il s'effondre au point de n'être plus qu'une loque. Alors Françoise, qui veut à tout prix sauver l'entreprise, consent à épouser un calfat originaire d'Ebersmünster, Ignace Mey. Elle meurt en 1883. L'année suivante, Mey se remarie avec Marie Eugénie Maar, également native d'Ebersmünster. Confronté à une concurrence croissante évoluant dans une conjoncture déjà difficile, l'artisan cesse son activité vers 1906.
François Joseph Rapp, le fils cadet de Jakob Rapp, était marié depuis 1787 avec Marie Elisabeth Nartzer, dont le père exerçait la profession de boucher à Erstein. En 1800, il décide de s'installer à son compte et fait construire la maison n° 161 Quartier Verd, de nos jours n° 25 rue des Bateliers. Dans la cour de la propriété subsiste un puits dont le linteau porte l'emblème des calfats avec, de part et d'autre, les initiales des conjoints et la date 1803 [20 ] L'atelier était situé derrière la maison, à proximité du « Mühl- graben » et juste en face du chantier de Jakob Rapp.
François Joseph Rapp meurt le 7 octobre 1835. La continuité de l'entreprise est assurée par ses fils Amand et François Joseph. Amand Rapp demeure Resté célibataire, Auguste Rapp construira des bateaux jusqu'en 1910, où une maladie implacable l'oblige à confier toute la clientèle au collègue Jules Laufenburger. Il s'éteint à la veille de la première guerre mondiale. Sa sœur, Mme Françoise Bohn, décède en 1929 et, en 1982, la famille vend la propriété à M. Jacques Strohl. La maison à colombage a été restaurée avec soin, mais le chantier couvert, qui avait 17 mètres de long, n'existe plus. Il s'est effondré durant la nuit de Noël 1980 sous le poids de la neige.
Emblème de calfat représentant un vaisseau sur le linteau du puits sis dans la cour de la propriété N° 25, rue des Bateliers. A noter la date 1803 et les initiales des propriétaires primitifs : FJR (François Joseph Rapp) et ELN (Elisabeth Nartzer).
La famille Joseph Rapp au bord du « Mühlgraben » (de g. à dr. : Françoise Rapp née Sittler, sa fille Françoise, Joseph Rapp et Auguste Rapp)
La lignée Rapp
L'ancêtre de cette famille de calfats, Jakob Rapp, naquit à Erstein le 22 juillet 1724. En 1753, il unit sa destinée à Elisabeth Ostwalt, issue comme lui d'une famille de pêcheurs. Les conjoints habitaient au coin de la rue des Bateliers, à l'endroit où celle-ci se coupe avec la rue du Chat. C'est sans doute eux qui avaient fait bâtir la maison. Malheureusement, le poteau cornier avec la date de construction et les initiales des propriétaires primitifs a été démoli au cours de travaux de restauration. Sur le plan cadastral napoléonien, la propriété figure sous le n 141 Quartier Verd ; aujourd'hui, elle porte le n 38 rue du Chat. Le chantier de construction, dont il subsiste encore quelques vestiges, s'étendait en contrebas vers le « Mühlgraben ».
Quand Jakob Rapp décéda en 1808 à l'âge de 86 ans, trois de ses fils exerçaient le métier : Michel, Jean Georges et François Joseph.
Généalogie : la lignée Rapp