Citoyen d'Erstein, Général de la Révolution Française et de l'Empire Napoléonien
Auteur : Colonel Yves BONNEL (ev)
Publié par la S.H.Q.C. tome 14
L'histoire nous révèle que les périodes exceptionnelles libèrent souvent des hommes et des citoyens dont le caractère et les facultés favorisent leur émergence de la société qui retiendra ultérieurement leur titre de gloire et dont la communauté se glorifiera à leur rendre hommage.
Au cours des XVIIIe -
Les hasards de la vie militaire, dont un séjour de deux ans à Verdun et Stenay, firent qu'il épousa une meusienne, Marie-
Son père eut deux frères. Seul le plus jeune, François-
Avant d'aborder la vie et la carrière du général, il m'a paru intéressant, pour l'histoire locale d'Erstein, de présenter tout d'abord, les généalogies de la famille Offenstein d'où sortira le glorieux général et dont les descendants, par cousinage, sont toujours fiers.
Figure illustre d'Erstein, François-
Tout jeune, il aidait son père aux durs travaux agricoles, ce qui développa en lui la force et la corpulence d'un homme adulte. M. Armand Schwaab, aujourd'hui décédé, a raconté les circonstances de son engagement militaire, contracté suite aux remontrances de son père pour avoir courtisé trop assidûment une fille de boulangerie, et s'être bagarré avec des soldats d"une caserne de Sélestat.
Sa carrière militaire commença ainsi modestement sous le règle du roi de France Louis XV, le 10 mars 1777, tout juste âgé de 16 ans et 8 mois, comme simple dragon au Régiment royal de Deux-
Cette unité fut envoyée en Amérique, sous les ordres de Rochambeau (1725-
Assagi et transformé par neuf années de dur service et muni d'un bon pécule, le jeune Offenstein revint au village natal, le 23.12.1786 à l'âge de 26 ans, rejoignant la ferme de son père qu'il avait quitté brutalement sur un coup de tête.
Ayant sans doute la nostalgie de l'armée (ou pour des raisons autres...), il quitta tout, à nouveau, pour s'engager le 1er janvier 1787 comme grenadier au régiment Infanterie-
Par la suite, les guerres de la Révolution et la nouvelle éthique de recrutement des officiers, lui fournirent l'occasion de se distinguer, abordant l'An II (1793) avec le grade de général de division à l'armée du Rhin.
L'empereur Napoléon 1er consacra ses brillants services en le faisant Officier de la Légion d'Honneur en 1805 et Baron de l'Empire en 1808. Sous la Restauration, le roi Louis XVIII confirma la valeur et les services de cet officier supérieur en lui maintenant sa retraite de Maréchal de Camp (3), ainsi qu'ultérieu-
LA RÉVOLUTION
La Garde Nationale (4), qui plonge ses racines dans les tréfonds féodaux de l'ancien régime, héritière de milices urbaines, communales ou bourgeoises, assurant jadis l'auto-
Offenstein, alors disponible, séduit par les idées généreuses de la Révolution française naissante, reprit du service militaire le 14 juin 1789, un mois après son congé, et un mois avant la prise de la Bastille à Paris.
Ses réelles qualités physiques et militaires le firent nommer de suite Major, chef de bataillon de la Garde Nationale sédentaire d'Erstein, son village natal, par ordre du général Spar, en vertu du décret du 15 mai 1789.
Cette nomination, fruit d'une bonne réputation, est alors le début de la brillante carrière militaire du futur général. Les événements vont se précipiter. Sous les ordres d'Offenstein, cette unité de la Garde nationale fut mise en activité pour faire du service sur les bords du Rhin situé à environ 7 km d'Erstein.
A la tête d'environ 300 gardes, tous volontaires, il eut la mission de surveiller la navigation sur le Rhin face aux immigrés. Cette surveillance fastidieuse ne convenait guère au caractère bouillant du jeune chef de bataillon.
Aussi, le 2 octobre 1791, il fut heureux d'être nommé a la tête du 1er Bataillon du Bas-
Pour éviter des batailles plus graves, le bataillon fut envoyé en 1792 aux armées du Centre, de la Moselle et du Rhin. Ces inci-
En juillet 1794, près de Sarrelouis, à la tête de différents détachements de volontaires, il chargea les Autrichiens qui furent mis en déroute complète et fit environ 60 prisonniers. Toujours en l'An II, à Peflingen, à la tête de trois bataillons le 1er Bon du Lot, le Bon des Ardennes et le 1er Bon des chasseurs de la Meuse il mit pied à terre, donna son cheval à tenir à un sergent du 1er bataillon du Lot, nommé Lacoste et monta à l'assaut sur une montagne élevée à travers un bois rempli d'abattis ; arrivé au sommet, il fit battre la charge par un tambour pour faire rallier la troupe : il prit trois redoutes à la baïonnette.
Après la prise de ces retranchements, l'ennemi laissa plus de deux cents morts dans cette affaire, non compris les prisonniers. En avant de Trêves, cet officier à la tête d'un faible détachement de cavalerie, a chargé vigoureusement l'ennemi à la prise de la Montagne Verte, contribuant au succès de l'opération.
Il fut le premier officier supérieur qui entra dans la ville de Trêves et qui la sauva du pillage dont elle était menacée. (ce qui est constaté par un certificat de M.M. les Maire et Membres du Conseil Municipal de ladite ville). Le résultat fut la retraite des Autrichiens. Il s'acquit des habitants le beau titre de "Sauveur de la Cité", nom inscrit par les magistrats sur les registres de la commune.
Mais les Représentants du peuple Hentz et Goujon en mission aux armées de la Moselle et du Rhin voulaient faire de l'Electorat de Trêves, suivant leur expression cynique, la vraie vache à lait de la République, exigeant de la ville 3 à 4 millions en numéraire dans les 48 heures.
La modération d'Offenstein fut perçue comme un crime, qui lui valut la destitution de son grade le 24 juillet 1794, par les 2 représentants du peuple. Ces relations éclairent la vraie nature d'Offenstein dont l'essor et l'avancement furent ainsi stupide-
Toutefois, le général Offenstein écrivit de Paris le 2 messidor An III (20 juin 1795) une lettre au Comité de Salut Public pour protester contre cette injustice et demander sa réintégration (voir copie de la lettre). Finalement " l'Arrêté pris par les Représentants du Peuple Hentz et Goujon, le 6 thermidor An II (24 juillet 1794), contre M. François-
En l'an IV, il est nommé le 29 juin 1796 Chef de Brigade à la Suite de la 10e demi-
A Balheim chargeant à la tête d'un détachement comprenant un sous-
Lors de la retraite de l'armée du Rhin, à Biberach il fit battre la charge, enlevant plusieurs pièces de canon et faisant environ 400 prisonniers ; à Fillingen, il prit une pièce de canon, un obusier et 200 prisonniers ; se distingua également en avant de Fribourg en Brisgau où le général Beaupuis fut tué.
L'armée de Moreau ayant fait un retrait, les Autrichiens entament le siège de Kehl fin 1796 ; l'ennemi s'étant emparé, après beaucoup d'effort, de la redoute dite du cimetière, il s'y porta avec la plus grande audace, parvenant à la reprendre ; mais Kehl sera finalement évacuée. Etant en réserve avec la 10e brigade de Ligne, il avait été choisi parmi toute l'armée du Rhin, par les généraux Desaix et Sainte-
Offenstein assuma ensuite, toujours aussi brillamment, plusieurs autres commandements :
Chef de Brigade titulaire de la 77e demi-
Chef de Brigade titulaire de la 44e demi-
Chef de Brigade à la Suite du 12e régiment de chasseurs à cheval, le 31 juillet 1799, sous les ordres de Masséna (armée d'Helvétie et Danube) ; lors du passage du Ministre de la guerre à Rheinfelden, sollicite par écrit le 8 mai 1800, le Commandement d'un corps de Cavalerie légère.
LE CONSULAT ET L'EMPIRE
Chef de Brigade commandant du 7e régiment de cavalerie, le 30 juin 1800, confirmé dans ce grade par arrêté du 21.10.1800 (armée du Rhin) ; employé dans la 2e division militaire de 1802 à 1803, puis à Verdun de 1803 à 1805, à 30 km de Dun, village natal de son épouse.
L'empereur Napoléon 1er reconnut ses mérites et le récom-
Muté à la division de cavalerie du général Pully, de l'armée d'Italie, le 23.9.1805, commandée par Masséna. Cette armée devint le 8e Corps de la Grande Armée ; il se distingua, le 12 novembre 1805, au passage du Tagliamento.
Le 22.11.1806, le 7e cuirassier est désigné pour faire partie de la 2e Brigade (Fouler) de la division de cavalerie du général Espagne. Il arriva à Berlin au mois de janvier 1807 et prit part à la campagne de Pologne. Le 8 février 1807 il se bat à Eylau.
Le 10 juin 1807, il eut le bras gauche fracassé par un éclat d'obus devant Heilsberg (7), (de plus, un chef de bataillon fut tué et 2 officiers blessés), alors qu'il accomplissait les fonctions de colonel commandant le 7e régiment de cuirassiers. Il est alors promu général de brigade le 25 juin 1807, après trente années de service, et nommé Baron de l'Empire le 19 mars 1808, juste mais tardive réparation ; que de chemin parcouru par ce fils de paysan, soldat de l'An II.
Il est ensuite attaché à l'état-
Sa proposition pour le grade de Commandeur de la Légion d'Honneur avait été ainsi rédigée : "Les certificats honorables dont cet officier est porteur, notamment ceux des généraux Desaix, Sainte-
Les circonstances firent que cette proposition n'eut pas de suite, le nom du général Offenstein ne figure pas parmi les 28 généraux alsaciens inscrits sur l'Arc de Triomphe de l'Etoile à Paris.
LA RESTAURATION
Après la chute de l'empire (traité de Fontainebleau du 11 avril 1814), Offenstein fut mis en non activité le 17 avril et à la retraite par ordonnance royale du 24 décembre 1814 avec une pension de 2697 F. Au retour de l'empereur de l'île d'Elbe et le départ du roi Louis XVIII le 28 mars 1815, il se rallia à Napoléon 1er.
Le 6 avril 1815 à Paris, auprès de l'Empereur sa nomination au grade de général de division, brevet déjà accordé par le Comité de Salut Public, le 25.9.1793 -
Mis le 18 juin à la disposition du général Molitor. La défaite de Waterloo ayant mis fin aux "Cent jours" (28 mars-
Maréchal de Camp de cavalerie définitivement en retraite le 1.1.1816, le baron Offenstein se retira à Mouzay (Meuse), 84, rue Grande (*), dans la famille de sa femme Marie-
Par décision du Roi en date du 6 juillet 1816, le minimum de 3597 F. payable à Montmédy (Meuse) lui est accordé, bien qu'il eut pu prétendre à un maximum compte tenu de ses services.
Le manque d'activité lui pesant, il séjourne provisoirement à Paris, N° 21 et 22, rue du Mail, et sollicite le 20 septembre 1830, soit à l'âge de 70 ans, d'être remis en activité, ou à défaut en disponibilité, pour reprendre le commandement du département de la Haute-
Il décédera chrétiennement, à 77 ans révolus, dans sa maison de Mouzay, canton de Stenay, arrondissement de Montmédy, le 27 septembre 1837. Il est le seul général à avoir habité dans cette commune. La veuve Offenstein-
Les cendres du général reposent toujours près de celles de son épouse, et de ses enfants, dans sa sépulture du cimetière de Mouzay. Eponyme d'une rue "Général OFFENSTEIN" qui continue d'honorer sa mémoire à Erstein, quartier de la Bleiche, ainsi qu'à Strasbourg-
Malgré de nombreuses recherches, y compris celle du maire de Mouzay en 1864, aucun portrait du général n'a pu être trouvé. A Sélestat le nom du Général OFFENSTEIN se trouve sur la plaque intitulée "Généraux Sélestadiens", fixée sur la façade du bâtiment de l'école élémentaire Ste Foy, place du Marché-
Décorations dont le Général F.J. Offenstein a été gratifié
Officier de l'Ordre de la Légion d'Honneur (16 juin 1804).
Chevalier de l'Ordre Royal de Saint-
Chevalier de l'Ordre du Mérite Militaire de Maximilien Joseph de Bavière.
Armoiries
François-
Blason : Ecartelé : au 1er , d'azur au lion d'or ; au 2e, des barons militaires ; au 3e de gueules au renard passant d'argent, sur une terrasse alaisée du même ; au 4e, d'azur au coq d'or.
INSCRIPTIONS DE LA PIERRE TOMBALE EN GRANIT
M. LE BARON OFFENSTEIN FRANÇOIS JOSEPH
MARECHAL DE CAMPAGNE RETRAITE. OFFICIER DE LA LEGION D'HONNEUR CHEVALIER DE SAINT-
ET DE MADAME LA BARONNE OFFENSTEIN NEE LAMACQ. DECEDEE A MOUZAY LE 5 JUILLET 1854 DANS LA 68e ANNEE DE SON AGE.
LEURS ENFANTS.
M. OFFENSTEIN EUGENE-
M. LE BARON OFFENSTEIN GUILLAUME-
REQUIESTANT IN PACE
Elle démontre la renommée régionale et nationale du Général :
Armoriai du 1er Empire, Vte A. Révérend.
Album des Armoiries concédées, Vte A. Révérend.
Dictionnaire biographique, Sitzmann.
Dictionnaire biographique des généraux et amiraux, Georges Six, tome 2, p. 263, Paris 1934.
Strasbourg historique et pittoresque, Seyboth, p. 259.
Guide napoléonien, Lavauzelle 1981, p. 99.
Nouvelle biographie générale, Firmin-
Liste des généraux et officiers supérieurs alsaciens ayant servi dans l'armée française, Revue d'Alsace, an 1876, p. 140.
Récits militaires d'Alsace, Veling (Pardeillan), p. 4.
Historique du 7' régiment de cuirassiers, capitaine Juzancourt, Paris.
Les gloires militaires de l'Alsace, Wirth Joseph, Paris 1899, p. 30, 133,255.
Fastes de la Légion d'Honneur, tome 3.
Historique d'Erstein, Abbé Jos. Bernhard, Rixheim 1883, p. 168.
Historique d'Erstein, Abbé René Friedel, 1927 (en allemand).
Pages d'histoire des communes, Henri Caburet (*), Lyon 1983, p. 63 à 68.
Dernières Nouvelles d'Alsace, no 234, 6 octobre 1960, p. 37.
Le Nouvel Alsacien, 26 mars 1981, page écrite par Lucien Busser, historien à Erstein.
(*) Historien décédé à Lyon, descendant de la branche François-
SOURCES
Service historique de l'Armée, Vincennes.
Archives départementales du Bas-
Cercle généalogique d'Alsace, Antoine Kipp, Sté
d'Histoire des 4 Cantons, Section Généalogique.
Archives municipales de Strasbourg, fonds Offmann.
Mairie d'Erstein.
Mairie de Mouzay.
Archives familiales, Dr Marc Offenstein.
Archives familiales, Pierre Schwaab, Erstein.
Mes remerciements vont à tous ceux qui ont bien voulu m'accorder leur confiance en me transmettant les informations en leur possession et, en particulier, M. les Maires concernés et les héritiers du patrimoine moral du général. Souhaitons que la publication de cet article par la Société d'Histoire des Quatre Cantons d'Erstein-
ARBRE GÉNÉALOGIQUE DE LA FAMILLE OFFENSTEIN : en téléchargement format P.D.F.