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PRESENTATION HISTORIQUE I HISTORIQUE II HISTORIQUE III ANNEXE
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Pour payer cet achat, Ulrich fait un emprunt auprès des juifs de Strasbourg et demande aux bourgeois d'Erstein d'en garantir le cautionnement, lourdes charges pour les contri-buables, d'autant plus que les ressources du Landgraf avaient considérablement diminué (la terrible épidémie de peste de 1313 qui avait coûté, rien qu'à Strasbourg, la vie à 15 000 per­sonnes et diminué toute la population de la plaine rhénane, suivie de la grande famine de 1315). Ainsi, les Ersteinois devront éponger les dettes du Landgraf avec les revenus propres de la ville.

Ulrich et son fils, ainsi que le frère d'Ulrich, s'engagent à ne point enta­mer les revenus et péages de la ville, jusqu'à ce que cette ville soit libérée du cautionnement. Les sommes à rembourser (capital + intérêts), étaient tellement exorbitantes, qu'il était impossible aux bourgeois d'Erstein de régler la dette en un seul versement. Par un acte signé le lundi après carnaval 1324, les bour­geois s'engagent à payer 200 Marks annuel- lement au Schullheiss Clauss Zorn de Strasbourg, auprès duquel Ulrich et son fils avaient engagé la ville pour le montant de 2600 Gulden.

Ulrich, malgé ses engagements, ne respecte pas les libertés accordées par Sigismund en 1303.

Sous la pression de quelques grands seigneurs (Walter von Geroldseck. Johann von Hoh-Rappolstein etc), Ulrich, en 1325, doit reconnaître les immunités du contrat de 1303 et renoncer à titre personnel aux res­sources de la ville au delà des sommes fixées.

En 1326, Ulrich paye les 580 Marks restants aux juifs, mais les problèmes continuent. En 1329, Ulrich engage une nouvelle fois ses droits sur la ville pour 1200 Marks argent à Burkhard von Hohenburg, Walter von Geroldseck et son fils Henzelin, ce qui n'empêche pas ces deux derniers de vendre, dès 1332, leurs droits sur la ville aux juifs pour 12 Marks d'ar­gent.

Très vite, Walter von Geroldseck, dit von Tübingen, prend de plus en plus d'influence sur la ville. Cette mainmise change complètement le pay­sage géopolitique de la région et s'avérera, à court et à long terme, catastrophique pour notre cité.

ULRICH DE WERDE

Au milieu du XIIIe siècle, la situation économique était souvent dramatique dans toute la vallée du Rhin. Le flux commercial, très intense, sur et le long du fleuve sauvage, était fortement perturbé par les sei­gneurs brigands. Installés sur les hauteurs, dans leurs nids d'aigle, ils surveillaient les commer- çants qui osaient s'aventurer sur ces voies ; fondant sur eux, pillant, rançonnant, tuant même sans vergogne, sûrs de leur impunité, l'autorité impériale étant totalement absente.

Même un sauf-conduit, payé à prix d'or, ne mettait pas les commerçants à l'abri d'une attaque, à une époque où ces seigneurs considéraient que l'ex­ploitation du malheur était un "droit honnête".

Pour rétablir la paix, assurer la libre circulation des biens et des personnes, dans un régime où l'autorité impériale avait totalement disparu, où le pillage bri­mait le travail et où régnait, en maître, le droit du plus fort, Arnold der Walpot, crée en 1254 à Worms, la grande ligue des villes rhénanes.

Bientôt, cette ligue ne se limite plus aux villes rhé­nanes, mais son action s'étend de Cologne à Zurich, de Strasbourg à Ravensbruck et Nuremberg. Les grandes distances entre les villes, les difficultés de communication, rendent les interventions souvent aléatoires.

Il se crée à l'intérieur de cette ligue, des groupe­ments plus petits (type Décapole des dix villes impé­riales alsaciennes instituée par l'empereur Charles IV en 1354) plus efficaces, surtout lorsqu'il s'agit de régler des problèmes de second ordre.

Ainsi, dès 1301, le chevalier Albrecht avait établi la paix entre Bâle et Seltz, avec des deux côtés du Rhin, les évêques de Bâle et de Strasbourg et les bourgeois de ces deux villes, ainsi que les Landgraf de haute et de basse Alsace. Se joignent à cette ligue, en 1323, les villes de Fribourg, Haguenau, Brisach, Sélestat, Colmar, Mulhouse, Rheinfelden et entr'autres le Landgraf Ulrich et même Walter von Geroldseck de Lahr, le vieux. On sait comment les seigneurs de Geroldseck exploitaient, à leur profit cette soi-disante paix...

LA GRANDE LIGUE DES VILLES RHENANES

Bertold von Bucheck, évêque de Spire, acquiert. en 1328, le siège épiscopal de Strasbourg pour la somme exorbitante de 18000 Marks. Pour éponger cette dette, il fallut exploiter toutes les ressources possibles. Malgré tout, l'évêque reste en bons termes avec les bourgeois de la ville. En 1332, à l'occasion d'une fête de la noblesse, les discussions politiques dégénèrent en échauffourées sanglantes.

Bourgeois et artisans se débarrassent de leurs dirigeants nobles (les Zorn. les Mulenheim...), les exilent, élisent à leur place un nouveau conseil de la ville et mettent leurs propres troupes à la disposition de Bertold, qui, de suite, se met à guerroyer pour mettre ses ennemis à la raison.

BERTOLD VON BUCHECK , ÉVÊQUE ET CHEF DE GUERRE

Situé à proximité du Rhin, près du village de Gerstheim, sur une légère levée de terre, le château était entouré de maré- cages. La forteresse était acces­sible par un étroit passage, de sorte qu'un très petit nombre de soldats suffisait pour résister à toute attaque.

Le site, particulièrement bien choisi, était, de par la nature du terrain, difficile d'accès et les Geroldseck l'avaient fortifié selon toutes les règles de l'art archi­tectural de cette époque. Compte tenu de l'importan­ce stratégique de ce château, qui permettait de sur­veiller à la fois la route de Strasbourg à Bâle et le flux commercial sur le Rhin, et de là, bloquer complète­ment le cas échéant, toute circulation, les Geroldseck se rendaient maîtres de tout le trafic avec la plus gran­de facilité.

Quelques vestiges, restes de murs, de douves, qui étaient paraît-il encore visibles au XVIIIe siècle, don­nent une idée; de la construction de ce château : "C'était un donjon massif de forme carrée, dont l'en­trée était aménagée à une certaine hauteur du sol.

Tout autour, se trouvait un fossé, se terminant à gauche et à droite par des douves doubles. A en juger par les restes, des ouvrages fortifiés étaient érigés sur des élévations de terre ; côté façade, il est possible de reconnaître d'autres ouvrages de défense. L'alimentation en eau des douves était assurée par une prise directe sur le Rhin.

Au fil des années, la famille Geroldseck, originai­re de Lahr. avait étendu son influence. Lorsque Walter devient seigneur de la place forte d'Erstein, il peut contrôler, pratiquement, tout trafic commercial sur la rive gauche et la rive droite du Rhin.

UNE FORTERESSE REPUTEE IMPRENABLE : LA SCHWANAU

Hohengeroldseck achevé vers 1250, détruit depuis 1689 (photo extraite du livre Reichenbach édité par la ville de Lahr).

Le château de Schwanau était sans doute, à l'origi­ne, un château impérial. Un ouvrage fortifié existait déjà à cet endroit du temps des Romains, peut-être même avant, à l'époque celte (1)  (voir carte, cliquez).

Cet ouvrage, construit pour surveiller la route commerciale des villes rhénanes vers Bâle et la Suisse, ainsi que le tra­fic fluvial sur le Rhin, est établi à un endroit particu­lièrement dangereux, dans le but de porter secours aux accidentés. L'obligation de secourir donnait droit, en guise de rémunéra- tion, de s'approprier les épaves amenées par le fleuve. Ce droit explique, sans doute, la construction de ces châteaux à des endroits propices aux naufrages.

Très vite, les droits de ces "fermiers de hauts fonds", ne se limitent plus aux épaves ; ils considé­raient comme cadeau du ciel, tout navire (y compris l'équipage et la cargaison) tout bâtiment échoué, soit par accident, soit par maladresse, incapa- ble de pour­suivre sa route par ses propres moyens. Certains sei­gneurs n'hésitaient pas à provoquer ces accidents, faisant même disparaître les mariniers, afin de s'empa­rer des charge- ments.

A l'aide de barques fortement armées ou de puis­santes catapultes, ils arraisonnaient les bateaux riche­ment chargés, s'emparaient du butin, emmenaient les marchands dans leur château, ne les libérant qu'après paiement d'une importante rançon, après les avoir laissé croupir dans des culs de basse-fosse. Pour justifier ces actes de barbarie, il suffisait que le châte- lain participe à une quelconque querelle opposant un seigneur à une des villes faisant partie de la ligue.

Ainsi, après avoir adressé aux bourgeois de Berne et de Zurich une lettre d'avertissement, les seigneurs de Geroldseck s'octroient-ils, sans ver­gogne, le droit de rançonner leurs marchands. La situation privilégiée de la Schwanau ne permet à aucun chaland de passer inaperçu sur le Rhin et cette forteresse acquiert, au fil du temps, la plus sinistre réputation.

D'après un document d'archives de Donaueschingen (1317), le commerçant Johannes Schwerter de Zurich, affirme avoir été, avec son frère et ses cou­sins, arraisonné, dépouillé, emmené et maintenu à la Schwanau par Walter de Geroldseck, et libéré enfin après versement d'une très importante rançon. Un autre document (livre de chant de Berne, 1803) affir­me que le même Walter, en 1313, a été contraint d'in­demniser 28 bourgeois de Berne, qu'il avait attaqués et dépouillés.

Brigandages, tortures, viols, étaient devenus des "droits" des seigneurs de Geroldseck. Solidement retranchés dans leurs repaires de Lahr, Schuttern, Hohengeroldseck (un vrai nid d'aigle, construit sur un éperon rocheux au XIIe siècle), ils contrôlaient la route du col menant de Lahr vers la vallée de la Kinzig. Maîtres de la Schwanau et de la ville d'Erstein, ils avaient la possibilité, et n'en fai­saient pas mystère, de surveiller tout le flux commer­cial sur le Rhin et les routes de la plaine rhénane, dans le but de prélever un droit de péage.

Il est évident que cette situation était devenue into­lérable, surtout pour les Strasbourgeois, avec à leurs portes, ces deux obstacles (Erstein et la Schwanau) sur les voies commerciales du sud. vers les cités du Rhin supérieur et de la Suisse. Les plaintes ne ces­saient d'affluer et c'est l'évêque de Strasbourg qui prendra l'initiative des opérations.

LES GEROLDSECK , SEIGNEURS BRIGANDS

Château de la ville de Lahr, « Wasserburg » construit par les Geroldseck vers 1240 ; une des quatre tours d'enceinte (X) existe encore sous la dénomination "Storchenturm" (extra­it de "Wasserburg Lahr" de Karl List/Ph. Brucker).

(1) Voies romaines dans l'arrondissement d'Erstein (R. Will).